La Carretera Austral est la route traversant la région des Lacs et d’Aisen au Sud du Chili. Cette route permet de relier Puerto Montt à Villa O’Higgins au Sud du Chili, une région particulièrement enclavée entre la mer et les montagnes. Les travaux ont débuté en 1976 à l’époque de la dictature de Pinochet et a été terminée récemment, puisque le dernier tronçon au Sud n’est ouvert que depuis le début des années 2000. Elle est désormais longue d’un peu plus de 1200 km. Elle est réputée comme étant l’une des plus jolies routes d’Amérique du Sud et est assez célèbre chez les cyclistes et les motards et en effet on en croise beaucoup des deux.
Mais revenons un peu en arrière ; nous vous avions laissé à El Chalten en Argentine et pour rejoindre cette fameuse Carretera Austral c’est déjà toute une aventure. Direction le Nord (comme d’habitude) sur une route en ripio (en gravier), il faut s’y habituer parce que la majorité de la Carretera n’est pas goudronnée. Après une quarantaine de kilomètres sous un grand soleil nous arrivons au Lago Del Desierto que nous traversons en ferry, nous rencontrons Léon un belge de 70 ans qui voyage en vélo également entre Quito (Equateur) et Ushuaia, nous le retrouverons plusieurs fois dans les jours qui suivent.
Nous installons notre campement de l’autre côté du lac, près du poste frontière Argentin et la vue sur le Fitz Roy au loin est splendide. Le terrain de camping est envahi de vélo, il faut dire que là où nous sommes, on ne peut passer la frontière qu’a pied ou en vélo.
Nous comprendrons pourquoi en repartant le lendemain. Après le poste frontière il y a 7km de montée ou il faut pousser le vélo sur un sentier de randonnée. Il fait beau et on transpire bien. Une fois en haut de la côte nous repassons au Chili et la descente de l’autre côté se fait sur une route de gravier en mauvais état mais largement praticable en vélo. Il nous aura quand même fallu 6h pour faire à peine plus de 20 km. On passe la douane chilienne et nous campons au bord d’un autre lac que nous devrons traverser le lendemain sur un autre ferry pour atteindre Villa O’Higgins et le début de la Carretera Austral (pour nous le début vu qu’on remonte mais sinon c’est plutôt la fin). Seulement voila le ferry ne vient que s’il fait beau et qu’il n’y a pas de vent. Certaines personnes restent coincées une semaine à attendre. On croise les doigts car les douaniers nous ont annoncé du mauvais temps mais en fin de compte le ferry arrive comme prévu le lendemain.
Après une traversée de quelques heures nous arrivons sur cette fameuse Carretera Austral, sous la pluie. Il y a 6 km entre le débarcadère et Villa O’Higgins que nous faisons rapidement sur une route de ripio en bon état, ce qui nous semble bon signe pour la suite (on déchantera rapidement). A l’Auberge de jeunesse où nous nous arrêtons pour la nuit nous retrouvons Philippe, le jeune retraité à vélo que nous avions rencontré sur la route et avec qui nous avions séjourné à El Chalten. Il est parti trois jours avant nous, mais on pense qu’on lui manquait et qu’il nous attendait (même si lui soutient que non…). Finalement on fera presque toute la Carretera Austral avec lui.
Première grosse étape après Villa O’Higgins, la ville de Cochrane à 230 km. Nous découvrons sur ces premiers jours les joies de la route en ripio, on avance de 50 km par jour, c’est un rythme complètement différent du goudron, un peu plus pénible et beaucoup moins confortable. Quelques kilomètres après le départ, Damien casse sa chaine une première fois (d’habitude c’est plutôt Nico) ça lui arrivera encore de nombreuse fois dans les jours qui suivent jusqu’à qu’il puisse la changer. Les paysages se suivent mais ne se ressemblent pas. Nous passons des paysages assez classique (montagnes et lacs) à des paysages beaucoup plus humides avec une végétation assez luxuriante. On essuiera d’ailleurs des belles pluies.
Nous croisons Léon tous les jours, il roule moins vite que nous mais il part très tôt le matin (peu importe le froid ou la pluie, un vrai courageux), du coup nous le rattrapons dans la journée puis, on se retrouve tous les soirs aux mêmes endroits pour camper.
Nous décidons de faire un petit détour pour aller voir Tortel, un village de pêcheurs sur pilotis. Très sympathique, mais la piste pour y aller est vraiment dans un sale état, il y a du vent et il pleut, c’est assez laborieux. Arrivé là-bas il faut porter les vélos dans des escaliers pour descendre jusqu’au camping. Il n’y a pas de route dans le village qui est construit à flanc de colline, seulement des passerelles en bois et des escaliers. C’est assez pittoresques et nous y passerons la soirée.
Le lendemain en repartant Damien décide de faire du stop jusqu’à Cochrane. Philipe, Nico et Vincent repartent donc sans lui. A l’heure du pique-nique une bonne surprise nous attend. Nous arrivons à une estancia ou des Chiliens croisé la veille, nous on dit que l’on pouvait prendre un café et acheter du pain et du fromage. A peine arrivé devant, une dame sort et nous invite à rentrer prendre un café. Sur la table en plus du café, il y a du pain du beure et de la confiture maison (excellente) ainsi que des sopapillas, des espèces de beignets frits. C’est plus un petit déjeuner qu’un vrai déjeuner mais on mange quand même ici, à volonté, le tout pour l’équivalent de 2,50€ par personne (bon il n’y avait plus de fromage mais ça valait quand même le coup).
L’après midi passe tranquillement jusqu’au bivouac du soir au bord d’une rivière dans un endroit magnifique. On s’essaye à la pêche (on a acheté de quoi faire à El Chalten après qu’un français (merci Romain) nous ait montré des photos de ce qu’il avait réussi à attraper), sans succès pour nous. On reste aux pâtes…
Il nous reste une soixantaine de kilomètre à faire pour arriver à Cochrane. On commence fort avec une grosse montée dès le début mais finalement on se rend compte presque avec surprise que ça se passe assez bien. Nous commençons à avoir l’habitude des côtes depuis le début de la Carretera, du coup plus ça va, plus c’est simple (on en reparlera en Bolivie à 4000m d’altitude). Après la monté, le paysage change d’un coup, c’est beaucoup plus sec (il y a même des incendies dans la région). La route de ripio est en très mauvais état, de la vraie tôle ondulée, et l’arrivée jusqu’à la ville se fait dans la fumée des incendies, c’est assez laborieux, nous avons l’impression que ça ne terminera jamais. On fini malgré tout par retrouver Damien et à aller manger un Burger et des frites !
Après quelques jours de pause à Cochrane nous repartons vers le Nord en direction de la seule grosse ville de la route, Coyhaique. Les paysages défilent devant nos yeux et le ripio (encore et toujours) défile sous nos pneus. Nous avalons les kilomètres, parfois sous le soleil mais plus souvent sous la grisaille et la pluie. Tant pis puisque le soleil sera au rendez-vous quelques jours plus tard lors de notre arrivée à Puerto Rio Tranquilo, un tout petit village situé au bord d’un immense lac aux eaux turquoise. Pas question d’aller se baigner car l’eau est bien trop froide, mais on profite du beau temps pour aller voir les fameuses cathédrales de Marmol, des formations rocheuses impressionnantes créées par l’eau et le vent. Pour y aller nous choisissons l’option bateau à moteur, bien moins cher que la sortie en kayak (et puis on est en jour de repos). L’excursion vaut vraiment le coup. Nous rentrons dans des grottes en pied de falaise et nous avons même le droit à une courses entre les bateaux au retour…
Dernière ville étape avant Coyhaique, Cerro Castillo et son fameux glacier, un des dernier du Campo de hielo (le champ de glace Sud Américain) sur notre route. Damien sautera l’étape en stop directement jusqu’à Coyhaique car il a besoin d’une nouvelle chaîne de vélo, la sienne est définitivement cassée et nous n’en avons plus de rechange. On retrouve avec plaisir une route goudronnée quelques kilomètres avant l’arrivée à Cerro Castillo, juste à temps pour une grande descente bien agréable après des jours à se traîner sur une mauvaise route.
Le lendemain nous nous attaquons à la petite randonnée permettant d’aller jusqu’au lac situé au pied du glacier. A notre arrivée (en fin de matinée), le vent est glacial et tellement fort qu’on prendra à peine le temps de manger abrité derrière un rocher. En plus le glacier est en partie caché par les nuages, heureusement qu’on l’a vu la veille depuis le village. Le lendemain à cause du mauvais temps la randonnée est même fermée.
Le soir au camping nous partageons un repas avec les Valis’help, deux françaises qui font le tour du monde en passant dans les écoles apprendre les geste de premier secours aux enfants et avec les Mojito Trail, un couple de français qui traversent l’Amérique à vélo (ils ont fait le Nord en 2018 et font maintenant le Sud).
Une grosse journée de vélo nous amène ensuite jusqu’à Coyhaique où nous retrouvons Damien qui a fait réparer son vélo et qui attend ses manchons de prothèses.
Quelques jours plus tard, c’est l’heure des au revoir. Nicolas et Vincent reprennent le vélo, Damien reste à Coyhaique attendre ses manchons de prothèses, qui ne devraient plus tarder et Philippe prend un avion direction Santiago pour gagner du temps. La suite de la Carretera Austral nous réserve encore une belle rencontre, puisque nous croisons le temps d’une soirée un couple de cyclistes français très sympa Paul et Pauline, ça ne s’invente pas… (nous qui oublions tout le temps le prénom des gens que nous croisons, là au moins on est sûr de s’en rappeler).
Après deux jours de route on se prend la pluie sans discontinuer jusqu’à la petite ville de Chaiten. On y passera 4 jours à attendre une accalmie qui ne viendra pas. Il faut dire qu’on est à l’un des endroits les plus humides du Chili… la ville est minuscule et aucune activité par temps de pluie. A cause du vent, l’électricité est même coupé pendant plus d’une journée. Cela en est trop pour notre patience et puisque la météo ne prévoit pas d’amélioration, nous décidons finalement de rejoindre Puerto Montt, la fin de la Carretera Austral, en ferry. Il nous manque donc quelques kilomètres de cette fameuse route ce qui nous donne une excuse pour revenir.
La ville de Puerto Montt n’est pas très belle, on y reste quelques jours, le temps d’aller au vieux marché goûter une soupe de fruit de mer. Damien nous rejoint après avoir enfin reçu son colis suite à de (très) nombreuses péripéties et contretemps.
Alors au final qu’avons-nous pensé de cette fameuse Carretera Austral, une route mythique dont on entend forcément parler lorsque l’on prépare un tel voyage. Eh bien ça vaut franchement le coup. Ce n’est pas toujours facile, la partie en ripio est vraiment usante (pour nous et pour les vélos). Il ne fait pas tout le temps très beau, ça grimpe un peu… mais malgré tout, la route est superbe. Les paysages changent tous les jours, on en prend vraiment plein la vue, à faire une fois dans sa vie !!
Attention il n’y a pas tout le temps d’eau chaude au camping
A bientôt pour la suite, nous vous parlerons de lacs (pour changer) de volcan et de fondue savoyarde…
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